les homos sont-ils des sous-citoyens ?

Ce matin sur France Inter, Gérard Collomb, maire socialiste de Lyon, a fait état de ses réticences vis à vis du mariage pour tous, pour des raisons plus que contestables. En effet, pour lui, c’est le début d’une suite de demandes qui mèneront à la gestation pour autrui (GPA) c’est-à-dire aux mères porteuses ! Je comprends tout à fait que des gens, pour des raisons morales ou par attachement à une société traditionnelle, rejettent l’ouverture du mariage aux homosexuels. Mais de grâce,
ne mélangeons pas tout !

A partir du moment où l’on considère qu’une sexualité normale est une sexualité entre adultes consentants quel que le soit le sexe des personnes, on ne voit pas très bien pourquoi certains citoyens n’auraient pas accès au mariage. Par ailleurs, il s’agit du mariage civil et les religions qui considèrent que l’homosexualité n’est pas normale pourront toujours réserver leur mariage aux hétérosexuels.

On confond aussi souvent les sujets : la sexualité, la parentalité, le mode de gestation… Et dans les modes de gestation Collomb confondait manifestement la procréation médicale assisté (PMA) et la gestation pour autrui (GPA). La PMA comprend différentes techniques dont les plus connues sont l’insémination artificielle et la fécondation in vitro. La GPA, suppose l’implication de 3 personnes : la femme qui fournit l’ovule, la femme qui porte l’enfant et le père. Du fait que la gestatrice ne sera pas la mère, on n’inclut pas la GPA dans le terme PMA, même si bien sûr la médecine intervient.

La GPA pose le problème des « ventres à louer », de la marchandisation du corps des femmes car comme le dit très justement Christine : « Mis à part des cas très particuliers au sein d’une famille (don entre sœurs) ou entre proches, quelle pourrait être la motivation d’une femme qui décide de consacrer une année de sa vie, (préparation préalable, grossesse,  récupération / réparation) à une GPA ? »
En France la GPA est interdite tandis que la PMA – qui se fait selon les principes d’anonymat, de gratuité et de volontariat –  est autorisée pour les couples hétérosexuels et que l’adoption est ouverte aux couples hétéros et aux célibataires.

Dans le sujet qui nous occupe on a plusieurs possibilités :
1/ Ouvrir le mariage civil aux couples homosexuels
2/ Ouvrir le mariage civil et l’adoption aux couples homosexuels
3/ Ouvrir mariage civil et adoption aux couples homosexuels et autoriser la PMA pour les lesbiennes.

Le contre-argument souvent avancé contre ces propositions est que l’enfant a besoin d’un père et d’une mère. Je ne me prononcerais pas sur le sujet, mais si c’est si important il faut alors interdire l’adoption par des célibataires… Car sinon cela veut simplement dire que les homos sont des sous-citoyens du fait de leur sexualité.

La GPA est vraiment un sujet à part, à séparer du #mariagepourtous ou de l’homoparentalité car elle est pose de graves problèmes éthiques et car son interdiction concerne tous le monde. Donc non, l’égalité de tous devant le mariage ou la parentalité ne conduira pas à l’autorisation de la GPA !

Pour conclure, voici un clip tourné dans le cadre du Projet entourage :

PS. Message de service pour Luciamel : si tu vas à une soirée où Hélèna est présente, merci de m’inviter car je veux bien la demander en mariage puisqu’elle a l’air d’y tenir  😎

Publié le 6 décembre 2012, dans politique et société, vidéos, et tagué , , , , , , . Bookmarquez ce permalien. 8 Commentaires.

  1. Salut Polluxe,

    Pour moi, tu abordes le vrai sujet en fin de billet. Enfin, j’entends par là la véritable objection. Mais je ne partage pas, tu l’auras déjà compris, la réponse que tu y apportes.

    Il est pour moi impossible de se contenter de voir dans ce débat une simple question d’égalité. C’est avoir une vision très partielle du sujet. Les adultes ne sont en effet pas les seuls dans l’affaire et, s’il s’agissait uniquement de dire (comme on l’entend), que l’on doit reconnaître que deux personnes homosexuelles peuvent s’aimer, je n’y verrais aucun souci.

    La réalité est que le mariage est inséparable de la filiation. C’est non seulement pour cela qu’il a été créé (et non pour donner un quelconque Brevet D’Amour d’Etat) mais c’est tellement vrai que le texte de loi qui ne mentionne dans son titre que le mariage traite également de la filiation, signe que les deux sujets sont véritablement indissociables.

    Alors, venons-en aux célibataires.

    Je te répondrais trois choses :

    1) Je ne considère pas que l’adoption par les célibataires soit une chose formidable. J’estime qu’un enfant qui a connu l’épreuve doit se voir offrir le meilleur cadre possible. Maintenant, le fait qu’une situation non optimale existe ne peut pas justifier à elle seule qu’on en légalise d’encore moins optimales;

    2)
    L’adoption par des personnes homosexuelles est encore moins optimale en raison des besoins de l’enfant, de la manière dont il se construit. Le Dr Lévy-Soussan rappelle déjà qu' »un homme n’est pas une mère comme une autre ». Il soulignait une étude qui montrait que, même dans des familles dans lesquelles c’était le père qui exerçait un rôle maternant ou, à tout le moins, était à la maison, et où la mère était peu présente, l’enfant allait toujours vers la mère pour certaines choses.

    Surtout, il souligne que, pour fonctionner, l’adoption doit offrir à l’enfant une fiction juridique crédible. Un couple de deux hommes ou de deux femmes n’est pas une fiction juridique crédible. Dans le cas de l’adoption par un(e) célibataire, l’absence d’un autre parent laisse à l’enfant tout un champ de possible ouvert. Il peut fantasmer son autre parent, s’en construire un, en rêver un etc. Avec l’adoption homosexuelle, on va dire à un enfant qu’il a deux pères ou deux mères et on lui impose ce deuxième parent qui, pourtant, n’est pas crédible. Un enfant ne peut pas « gober » qu’il est issu de deux hommes ou de deux femmes. C’est pourtant ce qu’on va lui dire.

    On essaie, inévitablement, de discréditer Pierre Lévy-Soussan. Je soulignerais deux choses : (i) il est tout de même le directeur de la première consultation pédopsychiatrique spécialisée en matière d’adoption nationale et internationale et (ii) il n’a pas un discours en une pièce.

    Je l’avais précisément interrogé là-dessus et il me disait qu’un enfant dans un couple avec deux hommes ou deux femmes, ça peut marcher. Pour lui, ça « peut marcher » mais au moins à une condition : bien distinguer les rôles. Il y a le père et son compagnon, ou la mère et sa compagne. De la sorte, on laisse à l’enfant la liberté de penser l’autre parent.

    3) Enfin, l’adoption par les célibataires n’a pas été légalisée parce que l’on a pensé que c’était objectivement une bonne chose, mais pour des raisons conjoncturelles. C’était après la Grande Guerre; alors qu’il y avait un grand nombre d’orphelins et un grand déficit d’hommes. Cela a semblé justifier d’assouplir les conditions de l’adoption, d’autant que de nombreuses marraines de guerre avaient créé des liens spécifiques.

    Bref, je trouve très biaisé d’engager le débat sur une question de sous-citoyen, ou d’égalité. Non seulement parce que c’est se préoccuper uniquement du niveau des adultes mais parce qu’une différence n’induit pas nécessairement une question de supériorité ou d’infériorité. Or les couples homosexuels présentent une différence irréductible en matière de filiation.Adopter un traitement différent n’est pas une discrimination.

    Enfin, je trouve regrettable d’engager le débat de cette manière parce qu’au bout du compte, c’est contribuer à la souffrance des homosexuels. C’est faire croire que les opposants les considèrent comme inférieurs, ce que je récuse évidemment et totalement. Bref, pour des raisons stratégiques, ça fait des dégâts.

    • « Avec l’adoption homosexuelle, on va dire à un enfant qu’il a deux pères ou deux mères et on lui impose ce deuxième parent qui, pourtant, n’est pas crédible. Un enfant ne peut pas « gober » qu’il est issu de deux hommes ou de deux femmes. C’est pourtant ce qu’on va lui dire. »

      En effet, l’enfant saura très bien qu’il est issu d’un homme et d’une femme. Et personne ne va lui dire le contraire ! Le secret n’est plus de mise aujourd’hui. On lui dira tout simplement la vérité comme dans beaucoup de couples adoptant ou homos qui sont déjà dans cette situation. Et l’enfant aura tout loisir de fantasmer sur le parent géniteur absent car parentalité et procréation ne vont plus de pair.

      « une différence n’induit pas nécessairement une question de supériorité ou d’infériorité »

      En effet, et je ne vois pas très bien pourquoi l’homoparentalité – qui existe déjà dans les faits – serait une parentalité inférieure, ce que sous-entend le terme de « situation non optimale » que tu utilises plus haut. Pour autant je suis d’accord avec l’idée que l’on ne doit pas faire des enfants à n’importe quel prix par égoïsme d’adulte, mais cela est aussi valable pour les hétéros.

      Quand à la position des pédopsychiatres ou des psys sur le sujet, il semble qu’elle ne soit pas univoque. Je ne connais pas Soussan, je raisonne toute seule, sans filet 😉

    • Dans ce cas si on suit votre logique quid de l’adoption inter-ethnique? Il est tout aussi peu crédible qu’un homme et une femme blancs donnent naissance à un enfant noir, que 2 hommes/2 femmes donnent naissance à un enfant, non? Pourtant des tas de gens adoptent des enfants qui ne leur ressemblent pas pour un sou et cela ne gêne personne…

  2. L’argument essentiel est, comme tu le dis, qu’un célibataire peut adopter un enfant, j’ajouterai que l’argument supplémentaire est que Ronaldo (Cristiano) a quant à lui opéré le « transfert » de son enfant sur le « mercato » de l’adoption/PMA/GPA à un prix défiant toute concurrence. Car, ne l’oublions pas : cette question implique également nos modes de vie de privilégiés/riches qui « achetons » des enfants (l’enfant n’est-il plus que le prolongement de nos narcissismes et/ou « objets » de réassurance ?) à des plus pauvres que nous. Le mariage pour tous ? Ah, Héléna est pour ? Moi, je me tâte. Brassens, lui, étant contre le mariage (car anarchiste) n’aimait que les femmes mariées (car moins possessives). Tiens en spéciale dédicace : J’ai l’honneur de ne pas te demander ta main
    Sinon, Héléna, si je la croise, je lui demande illico presto son tél 😉 et, surtout, je te la présente.

    L’homosexuel est-il considéré comme un sous-citoyen ? je dirais plus que, dans nos sociétés occidentales, il est surtout considéré comme quelqu’un qui ne représente pas la norme (i.e. la majorité), car, et c’est un fait, il fait partie d’une « minorité ». Tu me diras : on pourrait socialement parlant multiplier les minorités. C’est vrai. Alors, les minorités unies finiraient par constituer une majorité. Soit. Moi, par exemple, je fais partie de plusieurs minorités (immigrée, femme sans enfant, féministe, en couple non conventionnel…) et de plusieurs majorités (femme, femme moins payée qu’un homme, blanche, européenne, non pauvre, en bonne santé, ayant plus de 20 ans et moins de 80…).

    Merci pour ton billet, ça fait réfléchir.

    • Ronaldo c’est le joueur de foot brésilien ? Qu’a-t-il fait exactement ? Je ne suis pas très au courant de ce qui se passe dans le foot…
      Sinon je te rassure, tu n’es pas vraiment immigrée puisqu’à l’heure de l’UE tout citoyen européen est partout chez lui dans l’UE. Ne sont immigrés que ceux qui viennent d’un territoire non européen…

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