vacances romaines
Avant le 2ème tour, pour prendre du recul, à l’ombre des palais, au regard des statues et à l’eau des fontaines…
Qui voudrait figurer la romaine grandeur
En ses dimensions, il ne lui faudrait querre
A la ligne et au plomb, au compas, à l’équerre,
Sa longueur et largeur, hautesse et profondeur :Il lui faudrait cerner d’une égale rondeur
Tout ce que l’océan de ses longs bras enserre,
Soit où l’astre annuel échauffe plus la terre,
Soit où souffle Aquilon sa plus grande froideur.Rome fut tout le monde, et tout le monde est Rome.
Et si par mêmes noms mêmes choses on nomme,
Comme du nom de Rome on se pourrait passer,La nommant par le nom de la terre et de l’onde :
Ainsi le monde on peut sur Rome compasser,
Puisque le plan de Rome est la carte du monde.—
Tout ce qu’Egypte en pointe façonna,
Tout ce que Grèce à la corinthienne,
A l’ionique, attique ou dorienne,
Pour l’ornement des temples maçonna :Tout ce que l’art de Lysippe donna,
La main d’Apelle ou la main phidienne,
Soulait orner cette ville ancienne,
Dont la grandeur le ciel même étonna :Tout ce qu’Athène eut onques de sagesse,
Tout ce qu’Asie eut onques de richesse,
Tout ce qu’Afrique eut onques de nouveau,S’est vu ici. O merveille profonde !
Rome vivant fut l’ornement du monde,
Et morte elle est du monde le tombeau.—
Nouveau venu, qui cherches Rome en Rome
Et rien de Rome en Rome n’aperçois,
Ces vieux palais, ces vieux arcs que tu vois,
Et ces vieux murs, c’est ce que Rome on nomme.Vois quel orgueil, quelle ruine : et comme
Celle qui mit le monde sous ses lois,
Pour dompter tout, se dompta quelquefois,
Et devint proie au temps, qui tout consomme.Rome de Rome est le seul monument,
Et Rome Rome a vaincu seulement.
Le Tibre seul, qui vers la mer s’enfuit,Reste de Rome. O mondaine inconstance !
Ce qui est ferme, est par le temps détruit,
Et ce qui fuit, au temps fait résistance.—
Toi qui de Rome émerveillé contemples
L’antique orgueil, qui menaçait les cieux,
Ces vieux palais, ces monts audacieux,
Ces murs, ces arcs, ces thermes et ces temples,Juge, en voyant ces ruines si amples,
Ce qu’a rongé le temps injurieux,
Puisqu’aux ouvriers les plus industrieux
Ces vieux fragments encor servent d’exemples.Regarde après, comme de jour en jour
Rome, fouillant son antique séjour,
Se rebâtit de tant d’oeuvres divines :Tu jugeras que le démon romain
S’efforce encor d’une fatale main
Ressusciter ces poudreuses ruines.Du Bellay (Les antiquités de Rome)
Publié le 28 avril 2007, dans jours, et tagué poésie, voyage. Bookmarquez ce permalien. 1 Commentaire.
Ah la ville eternelle…